mercredi 17 avril 2013

L’opposition au #mariagepourtous était-elle prévisible ?

C’est un fait : beaucoup de français ont été surpris, et le gouvernement en premier lieu, de l’opposition qui s’est levée à l’automne 2012 sur le projet de loi du gouvernement visant à ouvrir le mariage civil aux couples homosexuels.

Le cardinal Andre Vingt Trois, président de la Conférence des Evêques de France, avait déjà largement fait connaître la position de l’église catholique pendant toute la campagne présidentielle. La désormais fameuse "prière du 15 août", alors que le projet de loi était annoncé l’assemblée nationale, a semble-t-il réveillé les esprits, mais la mobilisation semblait pour autant limitée aux seuls catholiques.

Tout a changé lorsque Virginie Tellene, aka Frigide Barjot, a pris le leadership des opposants au projet de loi, en réaction à l’organisation d’une manifestation par les intégristes de Civitas en novembre 2012. Cette communicante de longue date, habituée des cabinets ministériels, connaît également très bien les arcanes de la communication pour avoir co-fondé le groupe Jalons avec son mari, Basile de Koch.
Elle évite ainsi les écueils principaux, n’incluant pas Christine Boutin dans le collectif "manif pour tous", trop marquée par son combat contre le PACS en 1995. Au contraire, elle prend bien soin de définir son mouvement comme a-confessionnel et a-religieux, regroupant officiellement des personnalités de gauche comme de droite, des associations catholiques mais aussi musulmanes ou juives.

Pourtant, comme l’a montré l’enquête du Monde, la plupart des associations réellement existantes sont directement issues de la mouvance de l’Eglise catholique, et dans l’ensemble proches de la mouvance Alliance Vita et de Christine Boutin.

Pour qui connaît un tant soi peu l’Eglise catholique, et s’est intéressé au sujet, il n’est dès lors pas surprenant que l’opposition sur le projet de loi soit aussi farouche, ni que des liens se créent entre les opposants français et les organisations américaines qui se battent contre la reconnaissance du mariage des couples homosexuels et, au delà, contre des sujets de société tel que le déremboursement de l’IVG, le droit à la PMA, etc.

Il est étonnant, en termes de stratégie, que la fédération inter-lgbt, porteuse du projet dans le monde associatif, ne se soit pas préoccupée de mieux connaître ceux avec qui elle aurait à débattre, pour connaître ses motivations et définir une stratégie sur le long terme.

Du côté du gouvernement et du parti socialiste, s’il est quasi certain qu’ils avaient, dès le départ, connaissance de l’organisation des opposants au projet de loi, il est est surprenant qu’au delà de la tactique politique visant à ressouder sa majorité, ils aient délibérément pris le risque d’attiser les frictions sur ce sujet, là où ils auraient pu déminer le terrain, en sachant quels ressorts actionner.

Le résultat est cependant là aujourd’hui : si l’adoption du projet de loi ouvrant le mariage aux couples homosexuels ne fait aucun doute, une inconnue planant sur un éventuel retocage -à la marge, probablement- par le Conseil constitutionnel, la société est divisée, avec des opposants évoquant ouvertement des risques de guerre civile, de sang et de guillotine.
La majorité aura peut être remporté une victoire politique, mais aura failli, par un mauvais calcul politique, à son obligation de pacification de la société.


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